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dimanche 31 mars 2013

samedi 30 mars 2013

Samedi Saint



Mais que se passe-t-il donc ? Un grand silence règne aujourd’hui sur la terre, un grand silence et une grande soli- tude ; un grand silence parce que le Roi dort. La terre a tremblé puis s’est calmée parce que Dieu s’est endormi dans la chair, et il a réveillé ceux qui dormaient depuis des siècles. Dieu est mort dans la chair et il a ébranlé les enfers. Il s’en va bien sûr chercher le premier père, comme la brebis perdue. Il veut aller visiter ceux qui sont assis dans les ténèbres et dans l’ombre de la mort : Adam le captif, Ève la captive, à qui il va pour les délivrer de leurs douleurs, lui leur Dieu et leur fils. Le Seigneur a pénétré jusqu’à eux brandissant l’arme de sa victoire : la Croix. Dès qu’il l’a vu, Adam le pre- mier père, saisi de stupeur, s’est écrié en se frappant la poitrine : « Mon Seigneur soit avec tous ». Et le Christ a répon- du à Adam : « Et avec ton esprit ». Et lui prenant la main, il a dit : « Réveille-toi, toi qui dors, lève-toi d’entre les morts, et tu seras illuminé par le Christ ».
Je suis ton Dieu, qui pour toi s’est fait ton fils, pour toi et ceux qui naîtraient de toi. Et voici que maintenant, à ceux qui se trouvaient dans les liens, j’ordonne avec puissance : « sortez ». À ceux qui étaient plongés dans les ténèbres je déclare : « à vous la lumière » ; et à ceux qui s’étaient assoupis je dis : « debout ».
Je te le commande : Éveille-toi ; toi qui dors : je ne t’ai pas créé pour les liens de l’enfer. Lève-toi d’entre les morts ; moi, je suis la Vie des morts. Debout, toi qui es l’œuvre de mes mains. Debout, ton visage est le mien ; tu as été créé à mon image. Lève-toi, sortons d’ici ; car tu es en moi et je suis en toi. Nous sommes une seule personne ; on ne peut nous séparer.
À cause de toi, moi ton Dieu, je me suis fait ton fils. À cause de toi, moi, ton Maître, je me suis présenté comme ton esclave ; moi qui habite au dessus des cieux, je suis venu sur la terre et sous la terre. À cause de toi, ô homme, je me suis fait homme ; j’ai renoncé à tout secours, ne trouvant plus de liberté que chez les morts. Pour toi qui sortis jadis du jardin, j’ai été livré aux Juifs dans un jardin et crucifié dans un autre.
Vois sur mon visage, les crachats que j’ai reçus pour te rendre ton visage, celui du souffle originel. Vois les traces des gifles sur mes joues : il me fallait refaire à l’image de la mienne ta face corrompue. Regarde sur mon dos les mar- ques de la flagellation que j’ai endurée pour te décharger du poids de tes péchés. Vois mes mains percées de ces clous qui m’ont fixé au bois, parce que tu avais tendu la main vers le bois pour le mal.
Je me suis endormi sur la croix, et la lance a percé mon côté parce que tu t’es endormi au Paradis ; Ève était alors sortie de ton flanc. Mon sommeil t’arrachera à celui de l’enfer. Mon glaive détournera celui qui te menaçait.
Debout, sortons d’ici. L’ennemi t’a arraché du Paradis. Moi, je te donne place, non plus au Paradis, mais sur un trône céleste. Lui t’a fermé l’accès à l’arbre de vie. Mais moi qui suis la Vie dont l’arbre était le type, je ne fais plus qu’un avec toi. J’avais établi les chérubins pour ton service. Désormais, ils te comprendront dans le culte qu’ils doivent à Dieu.
Le trône a donc été dressé au dessus d’eux. Les porteurs sont là, disponibles. On a installé le lit. Les mets ont été apprêtés. Les tabernacles et les demeures de l’Éternité ont été ornées, les trésors qui contiennent tous les biens sont ouverts et le Royaume des Cieux qui fut préparé avant les siècles est devant toi. 

Homélie attribuée à Epiphane de Salamine

vendredi 29 mars 2013

Vendredi Saint










Contemplons Jésus en Croix


La foi en Dieu Père demande de croire dans le Fils, sous l’action de, l’Esprit, en reconnaissant dans la Croix qui sauve le dévoilement définitif de l’amour divin. 

Dieu est notre Père en nous donnant son Fils : Dieu est notre Père en nous pardonnant notre péché et en nous amenant à la joie de la vie par la résurrection ; Dieu est notre Père en nous donnant l’Esprit qui fait de nous ses enfants et nous permet de l’appeler «Abba, Père» (cf.Rm8,15).

C’est pourquoi Jésus, nous enseignant à prier, nous invite à dire « Notre Père » (Mt 6,9-13 ; cf. Lc11,2-4).
La paternité de Dieu est alors l’amour infini, la tendresse qui se penche sur nous, ses enfants, qui sommes faibles et qui avons besoin de tout. Le psaume 103, le grand chant de la miséricorde divine, proclame : « Comme est la tendresse d’un père pour ses fils, tendre est le Seigneur pour qui le craint ; il sait de quoi nous sommes pétris, il se souvient que poussière nous sommes » (vv.13-14). C’est précisément notre petitesse, notre nature humaine faible, notre fragilité qui devient un appel à la miséricorde du Seigneur pour qu’il manifeste sa grandeur et sa tendresse de Père en nous aidant, en nous pardonnant et en nous sauvant.

Et Dieu répond à notre appel, en envoyant son Fils, Il meurt et ressuscite pour nous, Il entre dans notre fragilité et fait ce que l’homme, seul, n’aurait jamais pu faire : il prend sur lui le péché du monde, lui, l’agneau innocent, et nous ouvre à nouveau le chemin vers la communion avec Dieu, il fait de nous les vrais fils de Dieu. C’est là, dans le mystère pascal, que se révèle dans toute sa lumière le visage définitif de Dieu. Et c’est là, sur la croix glorieuse, qu’advient la pleine manifestation de la grandeur de Dieu comme « Père tout-puissant ».

Mais nous pourrions nous demander : comment est-il possible de penser à un Dieu tout-puissant en regardant la croix du Christ, ce pouvoir du mal qui en arrive à tuer le Fils de Dieu ? Nous aimerions certainement une toute-puissance divine selon nos schémas mentaux et selon nos désirs : un Dieu « tout-puissant » qui résolve les problèmes, qui intervienne pour nous éviter les difficultés, qui soit vainqueur des puissances adverses, qui change le cours des événements et supprime la douleur. C’est ainsi qu’aujourd’hui certains théologiens disent que Dieu ne peut pas être tout-puissant sinon il ne pourrait y avoir tant de souffrance, tant de mal dans le monde. En réalité, devant le mal et la souffrance, pour beaucoup, pour nous, il devient problématique, difficile de croire en un Dieu Père et de le croire tout-puissant ; certains cherchent refuge dans les idoles, en cédant à la tentation de trouver une réponse dans une toute-puissance supposée « magique » et dans ses promesses illusoires.

Mais la foi en Dieu tout-puissant nous pousse à parcourir des sentiers bien différents : apprendre à connaître que la pensée de Dieu est différente de la nôtre, que les voies de Dieu sont différentes des nôtres (cf. Is 55,8) et aussi que sa toute-puissante est différente : elle ne s’exprime pas comme une force automatique et arbitraire, mais elle est marquée par une liberté amoureuse et paternelle. En réalité, Dieu, en créant des créatures libres, en donnant la liberté, a renoncé à une partie de son pouvoir, nous laissant le pouvoir de notre liberté. C’est ainsi qu’il aime et qu’il respecte notre liberté de répondre par amour à son appel. Comme Père, Dieu désire que nous devenions ses enfants et que nous vivions comme tels en son Fils, en communion, dans une totale familiarité avec lui. 

Sa toute-puissance ne s’exprime pas dans la violence, dans la destruction de tout pouvoir adverse, comme nous le désirerions, mais elle s’exprime dans l’amour, dans la miséricorde, dans le pardon, dans l’acceptation de notre liberté et dans une invitation inlassable à la conversion du cœur, dans une attitude faible en apparence – Dieu semble faible, si nous pensons à Jésus-Christ qui prie, qui se fait tuer. 

C’est une attitude en apparence faible, faite de patience, de douceur et d’amour, qui montre que c’est cela la vrai manière d’être puissant. C’est cela la puissance de Dieu ! Et cette puissante vaincra ! 

Benoît XVI, 30 janvier 2013.

jeudi 28 mars 2013

Jeudi Saint








méditation du Père Maurice Zundel. (30 mars 1972)

Jésus, à genoux, renverse toutes nos grandeurs pyramidales, toutes nos grandeurs de chair et d'orgueil et il nous conduit doucement, tendrement, il nous conduit par cette leçon de choses à l'apprentissage de la vraie grandeur. Il donne au plus petit la possibilité de devenir quelqu'un. Il introduit chacun dans cette aventure infinie qui a Dieu pour centre, pour origine et pour terme. Il supprime entre les hommes ces compétitions mortelles qui aboutissent à la haine et à la guerre parce que, il offre une grandeur qui est possible à tous, une grandeur qui peut être réalisée par chacun au plus intime de son coeur.
Davantage, elle ne peut pas l'être autrement. C'est une grandeur qui nous transforme jusqu'à la racine. C'est une grandeur que l'on devient. C'est une grandeur qui coïncide avec la vie. C'est une grandeur qui rayonne à travers notre présence,   .. ?.. que, il y ait compétition, qu'il y ait concurrence, plus chacun devient grand, plus les autres grandissent en même temps car, comme le disait Elisabeth Leseur si magnifiquement : " Toute âme qui s'élève élève le monde. "
Ce geste du Lavement des pieds qui a été commémoré dans la liturgie d’aujourd’hui, ce geste du lavement des pieds, il nous introduit de la manière la plus profonde au mystère de la Croix. Il nous donne de la comprendre ou à deviner, tout au moins, que la carrière de Jésus puisse se terminer par un échec, que cet échec soit aussi la plus haute révélation de Dieu, parce que ce qui importe à Dieu, c'est justement qu'il apparaisse toujours comme l'amour infini, c'est qu'il persévère dans son amour, même si nous le trahissons, même si nous le renions, même si nous l'abandonnons, même si nous n’opposons que notre indifférence à ses avances.
Son triomphe, c'est d'aimer toujours, d'aimer jusqu'à la mort de la Croix. Nous qui avons tant besoin de grandeur, nous qui, dans ce siècle doté d'une telle puissance sur la matière, nous qui nous demandons comment nous pouvons inscrire notre nom dans l'histoire, ce que signifie notre vie, qui paraît si vaine et si mesquine, nous apprenons ce soir justement que chacun de nous est appelé à une grandeur proprement divine, que la grandeur de Dieu n'est pas autre que celle-ci qui s'exprime dans l'agenouillement du Lavement des pieds.      


samedi 23 mars 2013

Signes vivants de la Tendresse de Dieu




Le pape François est descendu de son hélicoptère. Benoît XVI, qui l’attendait, vêtu d’un chaud manteau blanc, s’est alors dirigé vers lui et l’a étreint. Puis, les deux hommes en blanc sont montés dans la même voiture. Une fois arrivés au Palais, ils se sont rendus à la chapelle, Benoît XVI avançant à petits pas, s’aidant d’une canne. Là, le pape François s’est spontanément dirigé vers le fauteuil pontifical. Mais, s’inquiétant de la place de Benoît XVI, en dépit des signes donnés par celui-ci, qui voulait absolument prier en retrait, il le rejoignit finalement, et les deux hommes se sont agenouillés sur le même banc, délaissant le fauteuil pontifical. Puis ils se sont dirigés vers la bibliothèque où ils ont échangé, à huis clos et en italien, durant 45 minutes, de part et d’autre d’une petite table basse.

Le pape émérite portait une soutane blanche sans mantelet ni ceinture, le différenciant ainsi de son successeur. Ensuite, le repas s’est déroulé en présence des deux secrétaires, Mgr Gänswein et Mgr Xuereb. À l’issue du repas, Benoît XVI a raccompagné son successeur à l’héliport. Aucune apparition publique des deux papes n’a eu lieu.

On sait que le pape François, dès le soir de son élection, a qualifié son prédécesseur d’« évêque émérite de Rome ». Faisant cela, il a rectifié la version officielle du nouveau statut de son prédécesseur, qualifié jusque-là de « pape émérite ». Les deux hommes étant pareillement attentifs au choix des mots, le Vatican a voulu modérer le choc des images, en ce jour de rencontre inédite à Castel Gandolfo. Seules trois séquences ont été diffusées, montrant l’accueil à l’héliport, la prière commune et le début de la rencontre privée. Étranges images jamais vues : deux papes priant et travaillant ensemble. 

Journal "La Croix" du 23 mars.