Homélie pour la messe d’action de grâces pour sœur Marie-Paule
Évangile de Saint Jean chapitre 15 Versets 9-17
Frère Denis TRINEZ
N 201 You Tube 14 mai 2025
https://www.youtube.com/watch?v=dgTH04c0BMM&list=PLemHXzWPxCaxY2wso4-3x8C5AUza5qGlr&index=201&
« Présence Priante et Aimante »
Cet Evangile se situe après le lavement des pieds. C’est comme le Testament Spirituel de Jésus où Il va partager des choses essentielles à son groupe de Frères, d’Apôtres, de Disciples. Et donc, Il va donner ce qu’il y a de plus important pour Lui : la substance même de ce qui le fait vivre.
C’est « un bien » de recevoir cette Parole ce soir. Qu’est-ce qui est le plus important ? Où est le cœur de notre vie ? Où est l’essentiel de notre existence ?
Jésus nous dit « Je vais vous donner une Parole, non pas comme à des serviteurs ». C’est intéressant qu’Il le dise après le lavement des pieds, «mais à des Amis ». « Vous êtes mes amis » ; à des amis, on dit l’essentiel, on dit ce qui nous anime, on dit nos questions, on dit notre idéal, on dit nos buts, on dit ce que l’on espère.
À des amis on peut tout dire, on dit qu’un ami c’est quelqu’un qui nous connait et qui nous aime quand même.
Que va transmettre Jésus ?
Si l’on fait le lien avec la première lecture, ( Livre des Acres des Apôtres 13 , 13-25) c’est d’abord un témoignage collectif. Il est dit « vous serez, pour être ensemble, témoin de la Résurrection ».
J’ai trouvé cela intéressant par rapport à ce que nous avons voulu vivre ici, ensemble et différents : des religieuses, des laïcs, des prêtres et un diacre, ensemble pour porter témoignage, ensemble.
Qu’est-ce que le Père Dagens nous a demandé quand nous sommes arrivés ? : « Être à Angoulême une présence priante et aimante » C’est un sacré programme !
Au sujet du Père DAGENS, nous pouvons prier pour lui qui est souffrant.
A chaque fois que je le rencontre, il dit « Vous direz à la fraternité que je pense à vous, que je prie pour vous ».
Ce soir, nous pouvons réécouter ces paroles du Père Dagens « Une présence priante et aimante ».
Alors, « priante », je pense, en particulier, le dimanche soir ou les jours de fête, quand, à la fin de l’Adoration, on chante et que j’ai la joie de donner la bénédiction du Saint Sacrement.
Je me dis, c’est bien parce que le Seigneur est là, qu’on peut vivre ce qu’on vit ! Sans Lui, on ne pourrait pas, humainement, on n’y arriverait pas, parce que vivre ensemble, « il faut se les farcir quand même » mais c’est tellement merveilleux !
Je rends grâce à Dieu car nous avons tellement vécu de choses fortes et belles, dures aussi, (nous avons quand même eu six décès en six ans, ce n’est pas rien !).
Je trouve merveilleux le soin pris les uns vis-à-vis des autres. Quand Françoise était à Girac, ensemble, on s’y rendait tous les jours ; à Mansle, cela a été un peu plus compliqué, car plus loin, mais quand même, nous y allions plusieurs fois dans la semaine.
Mais je pense que, dans ce que nous avons vécu, ce que nous avons partagé, ce qui est très beau, au-delà de toutes les belles paroles entendues, c’est l’Amour partagé, par des petits gestes, un service, un regard, une attention et, comme vous me l’avez dit : c’est quand même l’essentiel.
Vous m’avez dit cela, pendant la retraite, à un moment où on ne pouvait pas parler, mais vous me l’avez dit quand même !
Oui, l’essentiel c’est cet Amour, mais cet Amour vécu n’est possible que parce que reçu dans l’Eucharistie, dans la Prière.
Nous sommes pauvres, mais au Seigneur « rien d’impossible ». Nous apprenons à vivre ensemble, différents.
Dans les premiers temps de la Fraternité, il a fallu s’accorder un peu, parce qu’on a nos habitudes. Il a fallu qu’on s’accorde sur la manière d’être des sœurs pour vous, pour les laïcs, pour les prêtres. L’idée, c’est que personne ne soit au-dessus. C’est le Seigneur qui est au-dessus.
Donc merci, sœur Marie-Paule de votre présence et de tout ce que nous avons partagé, aimé afin de devenir ensemble,« canal de cet Amour », avec nos limites, avec nos caractères, avec nos fatigues, avec nos maladies mais toujours en nous fixant sur le fait d’Aimer, de s’Écouter les uns les autres du mieux possible, pour pouvoir recevoir du Seigneur cette capacité d’Aimer comme Il a aimé : c’est incroyable ! Il y a des moments où c’est possible !
J’aime beaucoup ce texte de Karl Rahner qui pose la question :
• « mais quand, quand avons-nous fait l’expérience de la grâce ?».
A votre avis quand avons-nous fait l’expérience de la grâce ? Quand nous avons osé être frères, même si c’était difficile ? Par exemple, dire quelque chose de juste alors qu’on allait faire une injustice.
Alors, Karl Rahner dit :
• « s’il est, s’il nous est arrivé de pardonner en silence et sans espérer aucune récompense »
parce qu’on peut dire, je pardonne mais il faudrait que la personne soit gentille maintenant. Mais ça, ce n’est pas la grâce. La grâce c’est pardonner, sans attendre de retour.
C’est intéressant « si à certains moments, nous avons été bons avec quelqu’un sans attendre de compensation parce qu’il y a le risque de penser : « voilà je suis bon, il va être bon ». Ça c’est du marchandage.
• « Si un jour nous avons décidé quelque chose dans la certitude la plus absolue et guidés par la seule direction la plus intime de notre conscience ».
Et moi, je pense, sœur Marie-Paule que cette décision que vous avez prise de partir à Annonay, c’est une décision d’Amour. Parce que vous vous dites « voilà mes sœurs ne sont que deux et pour moi ça va être difficile ».
C’est une décision qui vient de l’Amour et qui est une expérience de la grâce quand on décide tout d’un coup de sacrifier quelque chose d’important pour Aimer. Donc merci pour ce témoignage.
• « Si nous nous sommes sacrifiés pour quelqu’un sans espérer de gratitude ».
Quelquefois, les parents disent cela : « j’ai tellement donné pour toi, est-ce que tu ne pourrais pas me rendre maintenant ? »
Ça, ce n’est pas aimer car aimer, c’est : « je donne parce que je t’aime et je veux que tu sois vivant ». Ce n’est pas je donne pour que tu me donnes.
• « Si nous avons essayé d’aimer Dieu quand nous n’y étions pas poussés par une grande vague d’enthousiasme ».
Il y a des jours où l’on n’est pas très enthousiaste et se dire que le Seigneur Il est là et que je vais me tourner vers Lui, même si je préférerais me retourner dans mon lit pour dormir.
Voilà, en fait, l’expérience de la Grâce : faire ce que naturellement on n’aurait pas forcément le goût de réaliser parce que ce sont des décisions justes. Cela vaut le coup, et cela donne la Joie, une Joie profonde, même si cela peut être difficile.
Hier je partageais cela avec une maman : le choix de son enfant est difficile pour elle. Mais je me suis permis de lui dire « Mais, est-ce que ce qui n’est pas important, c’est qu’il soit heureux, plus que qu’il soit bien là, pour toi ? ». Ce n’est pas si simple.
Aimer !
Que le Seigneur nous donne de croire, que « Ensemble », on peut s’aider à aimer vraiment, qu’on peut pardonner, qu’on peut aimer ceux qui semblent nous persécuter, qu’on peut prier pour ceux qui nous mettent en difficulté.
Parce qu’à ce moment-là qu’est-ce qui se passe ?
Notre cœur s’élargit aux dimensions du cœur de Dieu. Alors,sœur Marie-Paule, vous allez donc partir vers de nouveaux horizons et, en fait, le Seigneur nous envoie tous ailleurs.
Je suppose que l’actuel Pape, il y a deux ans, n’aurait pas imaginé devenir Pape. Sacrée responsabilité quand même ! Merci Seigneur parce que c’est vrai que notre Pape est« touchant ».
Et nous allons prier pour vous, afin que là où vous serez, vous puissiez continuer à aimer. Vous serez toujours dans la Fraternité, au-delà de la distance.
Donc, vous faites partie de la Fraternité et vous ferez toujours partie de la Fraternité, parce que nous avons besoin de vous. Nous, on ne peut pas faire sans vous, n’est-ce pas ? Nous, on ne peut pas faire sans vous et vous, vous avez peut-être besoin un peu de nous aussi !
En effet, nous allons continuer à nous porter, là où nous serons, pour être partout, « Présence priante et Aimante ». Cela ne veut pas dire qu’on est des « saints », mais cela veut dire que on se laisse travailler par la grâce, au jour le jour.
Que le Seigneur vous bénisse et vous garde !
Nous allons rendre grâce, maintenant, par l’Eucharistie, pour tout ce que le Seigneur nous donne, nous a donné et va nous donner, à vous et à chacun et chacune d’entre-nous, si vous êtes d’accord pour vous ouvrir à la Grâce.
Qui est d’accord ?
Merci Seigneur.
Après cette belle messe, avec sœur Marie-Paule et beaucoup d’amis, dans la joie, nous nous sommes retrouvés à Béthanie pour un repas partagé très sympathique et fraternel.